> Retour exposition « les montres s’arrêtent », la Glacière

Découvrez le dossier réalisé par la Glacière, suite à leur exposition « les montres s’arrêtent » chez illusion et macadam, dans le cadre de la résidence d’Audrey Martin, organisée par le Living Room et la Panacée, en partenariat avec illusion et macadam.

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Carton d’invitation
Photos de l’exposition, réalisées par Muriel Joya
Photos du vernissage, réalisées par Marielle Rossignol.

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Crédits photos : Muriel Joya.

Photos de l’exposition « les montres s’arrêtent » chez illusion et macadam, dans le cadre de la résidence d’Audrey Martin, organisée par le Living Room et la Panacée, en partenariat avec illusion et macadam.

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Carton d’invitation
Dossier de l’exposition, réalisé par la Glacière
Photos du vernissage, réalisées par Marielle Rossignol.

> « les montres s’arrêtent »


© Vincent Lhermet, 46’35N 3°23E, 2007 Photographie, extrait du journal Mode d’emploi de la fin du monde, Collectif la Glacière, 2012.

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Audrey Martin et son collectif, la Glacière,

Léo Bioret, Muriel Joya, Thomas Rochon-Connétable

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Dans le cadre de sa résidence au Living Room, Audrey Martin invite son collectif, la Glacière, à développer la deuxième partie de leur projet sur la fin du monde, les montres s’arrêtent. Elle présentera des productions spécifiques comme Global damage (des catastrophes à emporter) ou encore zéro point zéro, une installation vidéo en collaboration avec Muriel Joya, qui propose la destruction de l’image par une lumière blanche.

Chez illusion & macadam, 31 rue de l’Aiguillerie à Montpellier
. Vernissage vendredi 8 novembre 2013, à partir de 19h,
. Exposition ouverte les 9 et 10 novembre de 14h à 18h.

Liens :
. Site internet du collectif la Glacière
. Site internet Audrey Martin
. 140 mètres à vol d’oiseau, Audrey Martin en résidence
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Photos de l’exposition, réalisées par Muriel Joya
Dossier de l’exposition, réalisé par la Glacière
Photos du vernissage, réalisées par Marielle Rossignol.

> L’Hérault du jour – 10 sept 2013

L'Hérault du jour - 10 sept. 2013

> La Gazette – 5 sept 2013

La Gazette - 5 sept 2013

> Emilie Losch par Michael Verger-Laurent

Hélicoïde, Emilie Losch
Hélicoïde, Emilie Losch

 

A l’image de Lewis Caroll confrontant son Alice au pays des merveilles à de constants changements d’échelle, la grandissant et la rapetissant, Émilie Losch nous invite à relativiser nos certitudes perceptives en jouant sur les dimensions des objets qu’elle met en scène, en se faisant cartographe, ou architecte, pour chercher la même excitation ludique dans la découverte d’un monde aux propriétés inédites.

Ici, on se libère des habituelles normes perspectives : des bijoux agrandis et façonnés au fer à béton jusqu’à se libérer complètement de leur valeur d’usage (Maison(s)), des Origamis en cuivre, et un totem lilliputien en laiton (Construction) forment autant de déplacements demandés au spectateur pour arriver à voir une forme autant qu’une matière nouvelle. Le regard mesure d’ordinaire l’univers à l’aune du corps humain, qui a triomphé de son espace jusqu’à se l’approprier intégralement dans ses dimensions mêmes. La majesté comme l’indépendance des objets qui nous entourent, de notre environnement, de l’animé comme de l’inanimé, de l’univers physique et chimique, nous échappe par la déformation qui nous frappe de toujours chercher dans ces composantes extérieures ce qui peut nous confirmer, nous servir, nous être utile.

Nous constituons notre propre référent, par la médiation d’objets miroirs qui ne nous intéressent que dans cette dimension égotique. Notre occupation du monde ne peut pourtant se limiter à la répétition de ce processus d’auto-confirmation, si nous ne voulons pas que notre esprit comme notre imagination s’étiolent face à l’absence de stimulus extérieurs considérés comme tels.

Le travail d’Émilie ne se limite pas à explorer ces changements d’échelle : cette transformation verticale se double d’une extrapolation horizontale, dans la multiplication des motifs mis en jeu. Ainsi au sein des photographies du dyptique Trames; ou bien dans le travail réalisé sur le plan de la salle Saint-Ravy, reproduit à échelle réduite, puis réinterprété sous forme de volumes variables, ouvrant une nouvelle voie à cette exploration de la forme, déconstruisant et reconstruisant ses objets en se jouant des échelles et des dimensions (Fold/Unfold, Origamis).

Le motif est ici autant une intervention de l’homme, une manifestation éventuelle de ce qui fait problème dans notre occupation (suffisante) de l’espace, que le moyen éventuel d’une prise de conscience intellectuelle et spirituelle. Son expansion peut constituer un vestige de notre passage comme un rythme, un temps représenté dans l’espace – ainsi de cette immense cité cartographiée qui apparaît et disparaît dans la vidéo de son développement palpitant et crée une respiration propre (Expansion, Contraction). Le motif devient le moyen de s’affranchir de l’aliénation du regard normateur ordinaire, de la référence au corps, et libère celui-ci de toute obligation ; il trahit des séries de possibles qui pourraient contaminer ou transformer notre environnement en écrasant les réalités antérieures et échapper au contrôle strict que nous exerçons sur tout ce que nous voyons. Il est pourtant alors moins l’expression d’un risque incontrôlé qu’un outil de méditation et d’ouverture au monde.

Ce travail de la forme ne peut s’envisager sans un travail de la matière : c’est ici, dans la réintroduction du cuivre, de laiton, de l’acier, de ces matières à la fois familières et évocatrices du règne de l’inanimé, d’une altérité radicale, que se retourne le motif humain, indiquant comme l’amorce d’une révolution, le retour d’un impensé métallique (et plus largement minéral ou planétaire), de matières brutes devenues rares dans un cadre peuplé d’objets surdéterminés ; c’est aussi la raison pour laquelle Émilie insiste pour rendre aussi apparent que possible son processus créatif : elle veut montrer le moment de ce changement, de cette perturbation qui pourrait se répandre comme une traînée de poudre; entre ses mains le motif devient virus, l’étrangeté refait surface et perce de toute part – et avec elle une potentialité d’émancipation, une carte au trésor ou un mantra susceptible de nous libérer des contraintes que notre regard dominateur nous impose.

Michael Verger-Laurent

> Gwendoline Samidoust par Michael Verger-Laurent

biladi, Gwendoline Samidoust
biladi, Gwen Samidoust

 

Le travail de Gwen Samidoust explore la distance au cadre, le cadre que l’on se fixe comme limite, comme frontière, le cadre que l’on définit pour s’acquitter d’une tâche quelconque. Celui qui permet justement de rendre toute tâche quelconque et d’en faire un enjeu purement technique. Cadrer, c’est circonvenir, c’est réduire à une dimension négligeable.

Gwen Samidoust va mettre ce cadre en question aussi bien à l’intérieur de ses vidéos qu’au sein de ses oeuvres plastiques. Ainsi dans Marges, la personne qui, munie d’un balai, essaye de « nettoyer » la plage de ce que la mer y projette, épure le cadre même de la vidéo : les deux grandeurs se répondent, évoquant des frontières entre des zones qui doivent rester exclusives l’une de l’autre, le balai tendant à conserver ou à rétablir un espace inviolé. Le cadre physique de la vidéo est celui d’une plage de Tanger où se joue chaque nuit le destin de centaines de clandestins, où chaque jour les plus fortunés peuvent prendre des bains de soleil sous la protection de vigiles surarmés. Cette succession que le balai rappelle pourrait retraduire également un ballet mental, celui de notre réaction auto-immune à ce qui se passe autour de nous, de la manière dont nous essayons de faire table rase des stimulus qui déclenchent notre empathie, et comment l’occultation se révèle finalement impossible. La tâche symbolisée par le balai représente un essai pour réconcilier deux faces antinomiques de cet espace : l’une est la surface lisse et sans accrocs, « propre », qui ne permet pas de suspecter un quelconque problème ; l’autre est la face « envahie » par les restes, les traces, les flux, le mouvement, le désordre. Cette tâche, moins absurde qu’atavique, est aussi la manifestation du parcours de notre pensée (comme de notre corps en mouvement) pour couvrir la distance entre le monde que l’on nous présente et le monde tel que nous pouvons le percevoir.

Si l’effacement vain était la thématique de Marges, Encrage suit la logique inverse : le langage prend matière et forme dans l’espace, l’encre noire donne substance à un processus d’ancrage qui tient de l’enracinement – il faut nous réinscrire au sens propre à même la terre qui nous porte. L’errance humaine que les pieds symbolisent est ici retranscrite en errance du pinceau, au cours d’une cérémonie sans début ni fin qui n’est pas sans évoquer la répétition infinie de Marges.

On retrouve également cette idée dans la multiplication des Brouillons, ces chaussettes roulées en boule réalisées en barbotine : jamais ces ébauches ne connaîtront de version définitive. La continuité dans la production, autant que la variabilité infime mais sensible entre chaque modèle entraîne le suspens de la problématique de la finition comme de la complétion d’une tâche ; l’accumulation des exemplaires donne son indépendance à la répétition du geste, le mouvement apparemment bridé se libère de ses référents dans cette suite méditative. La mise en mouvement vient pallier à l’absence de modus operandi satisfaisant ou efficace pour compléter les tâches démesurées qui ont été fixées (que ce soit balayer la mer ou faire flotter le béton comme dans Corps-morts) : chaque tentative expose un peu plus celui qui s’y livre, en même temps qu’un sens se construit dans l’à-côté d’une problématique sans issue. Est évoqué ainsi le fantôme d’une spiritualité ou d’une mystique dans la transcendance d’un acte que les conditions de son exposition (effacement de l’acteur et projection à l’horizontale) rendent universel, ouvert à l’appropriation.

Gwen Samidoust propose là un retournement perceptif, chacun peut saisir les « corps morts » de sa pensée et en faire des flotteurs, peut donner de la légèreté au béton ; il est possible de ne pas finir écrasé par l’auto-assignation, de libérer sa pensée comme son corps de l’astreinte par le biais de cette réappropriation.

Michael Verger-Laurent

Emilie Losch, Origami, 2013, projet en cours de réalisation
Emilie Losch, Maison, 2013, projet en cours de réalisation

Emilie Losch
Travaux en cours

Exposition avec Gwendoline Samidoust, Galerie Saint-Ravy, Montpellier
Vernissage, Jeudi 5 sept. 2013, à partir de 19h
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Gwendoline Samidoust, Flotteurs, 2013, projet en cours de réalisation
Gwendoline Samidoust

Gwendoline Samidoust
Travaux en cours

Exposition avec Emilie Losch, Galerie Saint-Ravy, Montpellier
Vernissage, Jeudi 5 sept. 2013, à partir de 19h
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> Mehdi Melhaoui (La vague) par Michael Verger-Laurent

La vague impose au spectateur le défi de la frontalité. Une énorme masse en équilibre instable, mouvement arrêté qui menace à tout instant de continuer sa course écrasante, d’achever sa chute pour ensevelir le spectateur. Le saisissement du sublime arrive cependant sous une forme en décalage par rapport à l’immédiateté de la nature : la vague semble le produit du traitement transcendé de matériaux industriels, rebuts éventuels d’un cycle de production aux antipodes de la nature sauvage que représente la mer ainsi schématisée. Le mouvement sauvage peut tout aussi bien évoquer la puissance récente des tsunamis destructeurs qui ont ravagé la côte asiatique qu’un retournement conceptuel des objets manufacturés contre leurs créateurs.

En unissant ces deux univers, celui de la nature sauvage, qui nous apparaît de plus en plus lointaine et pittoresque (un alignement sans fin de cartes postales), et celui de nos grands œuvres manifestant notre puissance, le travail de Mehdi Melhaoui accuse l’écart qui se creuse entre notre perception et la réalité de notre monde : l’avènement de l’ère post-industrielle nous donne l’impression d’une maîtrise totale de notre environnement. L’ingénierie humaine nous promet de nous rendre complètement libres des contraintes de l’ordre naturel qui ne nous concernent donc plus.

Le retour à la nature semble donc illusoire dans le sens où rompre le contact est un acte d’émancipation pour notre société. C’est pour cette raison que nous avons si facilement divorcé du monde qui nous entourait et de ce qu’il représentait. Évidemment, nous y avons perdu également une part de poésie et de curiosité.

Quand nous nous trouvons face à la mer, nous voyons une plage et des transats, pas une puissance tutélaire, pas le berceau de la vie et de la civilisation, pas une instance tragique qui décide chaque jour du sort de ceux qui tentent leur chance pour changer de vie en s’embarquant à bord de frêles esquifs pour d’autres rivages, victimes des mirages de notre mode de vie. Ce que l’artiste essaye de nous faire voir, c’est le monde enfoui sous nos habitudes de perception. Le monde caché des puissances « mères », aussi bien que l’ailleurs évoqué par cette immense étendue. En perdant le contact, nous avons aussi perdu la curiosité pour l’ailleurs, pour l’exotique, pour le départ – dissimulé la nostalgie qui nous guette tous du fait même d’être humains (et simplement humains).

La « vague » promet une confrontation, la négation de cette facilité de l’horizon soumis, le retour du refoulé – nos matériaux se soulèvent et se font menaçants. Ce retour n’est pas une renaissance immaculée, la réconciliation avec un état antérieur de résonance perdue. C’est plutôt le rapport à un régime inconscient, celui des traces que nous laissons derrière nous, de l’immense amas d’objets et de matières désaffectées qui s’amoncelle dans cette zone aveugle et menace de nous ensevelir.

Si la matière est domestiquée ou niée (dans un effort pour ne pas s’en préoccuper), la pensée l’est aussi : impossible de s’imaginer l’autre, impossible même de sortir de soi. D’où la force double du geste artistique : présenter en même temps qu’une force brute un horizon fragile et distordu qui transfigure son exécution technique pour inviter le spectateur à exercer un regard sensiblement différent, et faire jouer les ruines internes à notre monde au moment même de leur fabrication, opposer ainsi la récupération empathique à l’impossibilité du retour. La matière existe, elle est là, palpable et émotionnellement chargée, il suffit que nous nous arrachions à nous-mêmes, que nous cessions de nier la catastrophe de notre déracinement, pour nous rouvrir au monde.